Il y a ma vie avant les cretons Couture, et ma vie après les cretons Couture. C’est comme ça, une ligne de démarcation, nette! J’en mange depuis un mois et je suis pas mal certain que ça va devenir une habitude. Il manquait un petit quelque chose à ma vie et ce n’était pas une relation stable, non! C’était les cretons Couture, qui égaient maintenant mes matins comme un rayon de soleil qui entre par ma fenêtre, pendant que je suis en train de boire une grosse gorgée de jus d’orange à même la boîte. Je suis maintenant certain que ma future ex ne sera pas végétarienne.
Les cretons de ma grand-mère étaient absolument merveilleux, mais mes tantes ont beaucoup de misère à perpétuer la tradition, parce que c’est juste trop d’ouvrage et de vaisselle, faire des cretons. En passant, on dit des cretons, ok? Pour moi, les cretons, ça peut juste se cuisiner avec du porc. J’ai essayé d’autres sortes comme au poulet ou au veau (sacrilège), mais ce n’était pas ça. Il y a aussi un équilibre assez dur à obtenir dans la quantité d’oignons. Souvent, ça goûte trop les oignons à mon goût. Parce que je ne retrouvais plus le goût des bons cretons de ma grand-mère, j’avais arrêté d’en manger voilà dix ans. Je m’étais rabattu sur le beurre de peanuts et autres alternatives…
Coup de foudre
… jusqu’à il y a un mois, quand le fils du propriétaire des Aliments Couture m’a fait visiter leur fabrique et m’a donné un pot de cretons, pis un autre de tête fromagée. Votre humble chroniqueur ne savait pas ce qu’était de la tête fromagée. J’ai fait sa rencontre avec une ficelle au pavot de la Boîte à pain et je suis tombé un peu sur le cul, mon ami cuisinier aussi. Il en reprenait à la pelle devant le match d’après-midi des Canadiens. On peut faire un parallèle avec les Canadiens, parce que les Aliments Couture a vu le jour en 1937. À l’époque, c’était un épicier boucher et la livraison se faisait à cheval dans les ruelles. Les fameux cretons ont fait leur apparition en 1950 et les ventes ont été si nombreuses que la compagnie a cessé les autres activités pour se concentrer uniquement sur les cretons. Mais avant 1950, les Couture fournissaient en viande le Vieux-Limoilou. C’est même eux qui ont fondé le IGA tenu aujourd’hui par Pierre Jobidon.
Ils allaient à la rencontre du chemin de fer et achetaient des « chars » de viande, c’est-à-dire un wagon de viande. Après, y ramenaient ça en charrette et poussaient le tout sur une rampe jusqu’au sous-sol. On peut toujours voir le trou (bouché par une grille) de la rampe sur la 12e Rue. Le sous-sol était rempli de pièces de viande de toutes sortes qu’on découpait. Un sous-sol rempli de bouchers avec des machettes pis du sang, c’est trash.
La recette gagnante
Aujourd’hui, on s’approvisionne chez un producteur de porc du Bas-Saint-Laurent. La différence, de l’avis du boss, c’est qu’ils achètent des épaules de porc à gros prix, tandis que d’autres prennent des restants de n’importe quoi. «T’es mieux de payer plus cher… Oui, je suis le plus cher, mais je suis le meilleur par exemple!» C’est vrai; sinon, les cretons Couture n’auraient pas si bon goût. On met les morceaux d’épaule dans des cuves et on mélange avec de l’eau bouillante jusqu’à ce que ce soit cuit avant d’enlever les dernières impuretés. Puis, vient l’étape des fameuses épices. J’ai demandé c’était quoi, les épices, et je n’ai pas eu de réponse, seuls des yeux qui brillent et un regard avare. Enfin, on laisse reposer 24 h et c’est ça qui sent bon quand tu te promènes sur le coin de la 12e Rue et de la 4e Avenue le matin.
Les Aliments Couture écoulent plus de 6000 livres de cretons par semaine. De l’avis du boss, il en reste jamais sur les tablettes. «Même recette que dans les années 1950, on garde ça simple mais efficace.» On distribue dans la grande région de Québec jusqu’à Saint-Anne-de-la-Pérade sur la rive nord, et jusqu’à Saint-Apollinaire sur la rive sud. Mais le château fort demeure toujours Limoilou et Charlesbourg où l’on vend 36 « pans » en moyenne par semaine. C’est l’équivalent de 122 kilos, donc 270 livres de cretons qui sont consommés par semaine ici!
Des souvenirs qui sentent
Il y a toujours des souvenirs qui accompagnent les classiques. Voici celui de Richard Sainte-Marie, auteur, originaire de Limoilou :
Quand j’étais petit, nous habitions au 1015 de la 3e Avenue, au-dessus de la bijouterie Bédard et Tessier, presque au coin de la 10e Rue. La Boucherie Couture était nos voisins au coin même de la rue et je crois bien qu’il y avait aussi une autre boucherie qui s’appelait Couture sur la 4e Avenue. Ils faisaient des cretons en début de semaine et ça sentait très bon tout autour. J’espérais toujours que ma mère en achète. Elle m’envoyait en chercher un morceau que le boucher enveloppait dans du papier à boucherie rose attaché avec de la ficelle qu’il tirait d’un gros rouleau suspendu au plafond. Des fois, quand le papier demeurait assez propre, je m’en servais pour faire des dessins».
Si vous avez d’autres souvenirs, je vous invite à écrire dans la section commentaire, ci-dessous. Voici le lien vers le tout nouveau site Internet des Aliments Couture; vous y trouverez des informations complémentaires sur leurs produits : alimentscouture.com.
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